à Monsieur Gilles de Robien,
                        ministre de l'Equipement, des Transports,
                        du Logement, du Tourisme et de la Mer


OBJET : Voiries autoroutières COL, A45, A89, A48
Référence : Votre courrier « Sec_E / 04003712 - GRD : 04001962 » du 5 avril 2004


Monsieur le Ministre,

DARLY est une coordination d'associations (voir liste en annexe) sur la Région Urbaine de Lyon, et à laquelle la Sauvegarde des coteaux du Lyonnais est adhérente et rattachée.

C'est avec grand étonnement que DARLY a pris connaissance de votre réponse à la SCL.
Certes, le CIADT du 18-12-03 a décidé de la réalisation des voiries autoroutières citées en objet, mais ces décisions ont toujours été considérées par DARLY comme non irréversibles pour les raisons suivantes :

-1) La pollution :
Malgré l'amélioration des motorisations, de la qualité des carburants et des traitements des gaz d'échappement, la pollution ne cesse de croître et de s'étendre. Comme vous le savez cela est du à l'augmentation de la circulation des Poids Lourds et des Voitures Particulières, à l'engouement pour les véhicules genre 4 x 4 gros émetteurs de CO2, à l'alourdissement des véhicules du à tous les accessoires d'assistances, de sécurité, d'automatisme et de confort (climatisation).
Les rapports du COPARLY confirment cet état de chose, en particulier pour les NOX et les poussières fines.
Ceci a de graves conséquences sur la santé des habitants : multiplication des allergies, des affections pulmonaires, des bronchiolites, etc...

-2) L'ozone :
Aussi bien les pics en agglomération que les moyennes mensuelles et annuelles, tant en ville qu'en zones rurales et de montagne sont en forte augmentation, atteignant une moyenne annuelle proche de 50μgr/m³ dans les monts du Beaujolais, avec des valeurs supérieures à 100μgr/m³, soit supérieures à 50ppb, alors qu'à partir de 30ppb l'ozone a un impact sur la végétation.
(voir ci-joint l'extrait du rapport de Jean-Félix Bernard, président du Conseil National de l'Air accompagné des commentaires de DARLY)
L'ozone troposphérique est un risque pour la santé et l'environnement. Il est source d'irritations nasales et oculaires. Il augmente la sensibilité aux pollens. Il provoque des nécroses des feuilles des végétaux et participe à l'acidification des pluies.  

-3) La priorité pour les crédits :
L'aide de l'Etat aux Conseils Régionaux pour le développement des réseaux TER et périurbains a été réduite. De même les subventions accordées par l'Etat au SYTRAL pour le développement des lignes fortes de TCSP ont été supprimées.
Dans ces conditions de réductions et de suppressions d'aide aux investissement en faveur des Transports Collectifs, il est difficile d'admettre le maintien de réalisations autoroutières coûteuses.
La révision du PDU (projet arrêté au 11 mars 04) avoue d'ailleurs : « Les ressources financières des collectivités ne permettent pas aujourd'hui de financer l'ensemble des projets prévus »
Vu l'endettement actuel de l'Etat, il ne serait pas raisonnable de prévoir de nouveaux emprunts, qu'ils soient nationaux, territoriaux ou privés et de reporter ainsi sur les générations suivantes les problèmes que nous ne pouvons résoudre. Il faut réserver et affecter la faible quantité des crédits qui nous restent aux transports collectifs et au fret ferroviaire, fluvial et maritime.


-4) La péri-urbanisation et le non gel des pénétrantes :
Le PDU de 1997 prévoyait le gel des pénétrantes. Or, le tronçon existant de l'A45, qui constitue bel et bien une pénétrante, est en cours d'élargissement, suite à sa saturation et à la demande insistante des Syndicats Patronaux du secteur et de la Chambre de Commerce.
Il en serait de même pour le tronçon du projet d'A89 se dirigeant vers La-Tour-de-Salvagny, donc vers l'A6 et Lyon et non vers l'A46 Nord et Genève, s'il se réalisait.
En effet, pour  ce tronçon d'A89, le texte qui a été soumis à enquête publique fin 2001 précisait : « un développement économique est prévu le long de cet axe.» Comment dans ces conditions voulez-vous que l'on croit au COL réservé soit-disant au trafic international, alors qu'il serait relié par des échangeurs avec l'A45 et l'A89 et, pour ce dernier, à moins de 12km de Fourvière !...      
Dans ces conditions, la coordination DARLY voit mal comment ces voiries autoroutières ne favoriseraient pas l'étalement urbain et la péri-urbanisation.

-5) L'Effet de Serre :
Toute augmentation de la mise à disposition de voiries a toujours engendré une augmentation du trafic, elle-même génératrice d'émission de gaz carbonique, donc d'augmentation de l'Effet de Serre.
La solution n'est pas d'essayer de décongestionner le nœud lyonnais par de nouvelles voiries autoroutières, mais de rechercher d'autres solutions compatibles avec le Développement Durable et n'augmentant pas l'Effet de Serre.
Ces solutions existent ; certaines sont déjà en application dans d'autres pays : majoration de la TIPP pour les transports routiers ; RPLP (redevance fonction du tonnage et des kilomètres parcourus) comme en Suisse ; déconnexion des croissances économiques et des transports ; développement des frets ferroviaire et fluvial ; étalement des congés ; modulation des péages, etc.

Le premier objectif doit quand même être d'essayer de sauver la planète et les humains qui l'habitent !...

-6) Les ressources fossiles et leurs substituts :
Les ressources de produits fossiles s'épuisent et leur prix va croître avec leur rareté et leur coût de production.
Il faut se rappeler que :
-la courbe d'épuisement n'est pas une courbe carrée (40 ans de production au niveau actuel, puis plus rien), mais une courbe en chapeau de gendarme dont nous avons quasiment atteint le maximum,
- depuis 10 ans les nouvelles découvertes ne représentent que le quart de la consommation mondiale,
-cette consommation mondiale est en forte augmentation,
-les deux tiers de nos importations de pétrole le sont pour les transports.
Il faut aussi tenir compte de ce que :
-les piles à combustible ont besoin de méthanol ou d'hydrogène et que pour l'instant 96% de l'hydrogène vient du pétrole.
-s'il fallait faire rouler les transports en France à partir de l'hydrogène nucléaire, il faudrait doubler le nombre de centrales nucléaires ce qui n'est pas acceptable.
-s'il fallait faire rouler les transports en France à partir de la biomasse, il faudrait que toutes les terres cultivées en France ne servent qu'à faire de la biomasse, ce qui est aussi une impasse,

En conclusion,
DARLY s'interroge donc sur le bien-fondé de décisions de réalisations pour lesquelles :
-    les inconvénients semblent bien supérieurs aux avantages
-    les certitudes d'utilisation et de possibilité d'amortissement sont loin d'être acquises, bien au contraire.

DARLY aimerait donc vous lire sur tous ces points et vous en remercie à l'avance.

DARLY envoie copie de ce courrier à Monsieur Serge Lepeltier, Ministre de l'Energie et du Développement Durable, ainsi qu'à Monsieur Jean-Jack Queyranne, Président du Conseil Régional Rhône-Alpes.

DARLY vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'assurance de sa très haute considération.
                    
                    Bernard THIERRY, président de DARLY
                    (Ingénieur ICAM)